Écrit par Roger Sue
Roger Sue présente ici l’émergence d’une nouvelle société de la connaissance, les transformations sociales et économiques qu’elle va générer et sa contribution probable à un renouveau démocratique : « Un nouveau bain culturel irrigue la société, il n’est plus seulement aujourd’hui le produit de la démocratisation du savoir, mais plutôt celui de sa recomposition sous des formes inédites, variées dont chacun à sa manière se trouve à la fois dépositaire et actionnaire ». Autant de raisons, donc, d’en soutenir l’apparition.
La Fin de la Vérité
Un étonnant consensus
Un fort consensus entoure « la société de la connaissance »[1]. Tout le monde semble d’accord sur ce label et l’identité de la nouvelle société émergente, que ce soit les grandes institutions internationales (ONU, OCDE, UNESCO), l’Union européenne, les politiques, de droite ou de gauche, les médias, les entreprises … Côté experts, on fait certes valoir ses préférences pour « société du savoir », « cognitive », « apprenante »[2] (etc.) tout en reconnaissant l’utilité d’un terme commun. En revanche, notons que l’on parle pratiquement indifféremment « d’économie de la connaissance » ou de « société de la connaissance », comme on l’a fait pour économie industrielle et société industrielle. C’est un signe. Celui d’une transition vers un nouveau modèle de société, d’un changement global de mode de production économique et social. Rien de moins…
Dont acte. Nous sommes ou nous entrons dans une société de la connaissance. Mais si tel est le cas, il est surprenant que cela ne suscite pas plus de débats ou de questions, comme si tout le monde savait de quoi il retourne et en convenait. Dans des sociétés qui se disent volontiers désenchantées, sans projets, en panne de sens et en mal d’avenir, voilà qui est paradoxal. Pourquoi cette société de la connaissance qui pourrait nourrir de nouveaux enthousiasmes, relancer le débat public et politique, refonder voire même dépasser l’opposition entre capitalisme et socialisme, laisse-t-elle finalement relativement indifférent et sans grande réaction ? D’abord, « la société de la connaissance » reste une abstraction, aussi conceptuelle que son énoncé. On ne voit pas bien ce qu’elle recouvre, si ce n’est le progrès scientifique et l’innovation technique dont on a appris à se méfier pour cause de « dégâts du progrès »[3], d’atteintes à la santé ou à l’environnement. De la société de la connaissance, il y aurait autant à redouter qu’à espérer. Ensuite, la société de connaissance passe pour une affaire de spécialistes, de chercheurs, d’experts, à tout le moins de décideurs privés ou publics, sur lesquels on n’a guère de prise. Son apparente neutralité – la connaissance n’est ni de gauche ni de droite – ne la relie pas aisément aux grands choix politiques, d’autant moins que les politiques affichent en la matière une parfaite unanimité. Enfin, on ne voit pas bien ce que cela change dans la vie sociale ou l’organisation de la société. Ne sommes-nous pas déjà dans une société de la connaissance dominée par un modèle technoscientifique qui va poursuivre ses avancées sans que cela modifie fondamentalement la nature de la société ni que cela réalise le bonheur sur terre ?
En un mot, la société de la connaissance est plus perçue dans sa continuité que dans la rupture, dans la poursuite du développement des sociétés modernes dominées par la rationalité, les sciences et les techniques. D’une manière générale, la littérature officielle va dans ce sens et conforte cette opinion dominante, sorte de doxa qui masque la vraie nouveauté et le potentiel révolutionnaire de la société de la connaissance. Ainsi, depuis le sommet européen de Lisbonne en mars 2000[4], le cap est fixé sur l’économie de la connaissance, véritable programme fédérateur qui, conseil après conseil, propose une stratégie très consensuelle. Les recettes sont éprouvées et régulièrement rappelées, comme le fait périodiquement le Conseil économique et social dans ses rapports[5] : « Conforter la formation initiale et continue », « Investir massivement dans la recherche développement et l’innovation aux niveaux européen et national », « Mettre en œuvre des pôles de recherche et d’enseignement supérieur, en favorisant effet d’entraînement et innovation », etc. Telles sont les principales têtes de chapitres pour « l’édification de la société du savoir et de l’économie de la connaissance ». Si l’on se tourne vers l’UNESCO[6], plus ouverte aux différentes appréhensions des savoirs dans le monde et rompue à la diversité des systèmes éducatifs, le regard se veut plus large et plus ouvert. Il y est autant question de révolution de l’information et de nouvelles technologies, de la participation du public à la construction des savoirs, de la préservation des savoirs vernaculaires et des cultures locales ou encore de l’éducation tout au long de la vie. Mais si l’optique s’élargit, les grands facteurs qui président à l’édification de la société de la connaissance restent les mêmes : une éducation à la hausse, de nouvelles technologies de l’information et de la communication, une part sans cesse croissante de la recherche fondamentale ou appliquée et de l’enseignement supérieur dans la richesse mondiale, sur fond d’inégalités persistantes. Cela ne marque pas une rupture de modèle, tout au plus une plus grande centralité des institutions et instruments du savoir qui passent progressivement au rang de nouvelles industries au cœur de la société, de son économie et de sa croissance. Ce n’est évidemment pas rien mais là n’est pas l’essentiel. On se trompe sur le sens de la « connaissance ».
Le flux et le corpus
Avec la société de la connaissance, c’est beaucoup plus fondamentalement une nouvelle conception de la connaissance qui se dessine en rupture, ou tout au moins en décalage, avec à notre représentation classique de la connaissance dominée par le paradigme technoscientifique qui lui servait de colonne vertébrale, de référence. Comme le résument justement Alexandre Léné et Danilo Martucelli : » La consolidation de l’idée de la société de la connaissance transforme la nature du savoir dans cette société »[7]. Dans la société de la connaissance, celle-ci est précisément partout, relevant d’un flux créatif permanent et foisonnant, plus ascendant que descendant, émanant de toutes les parties de la société et non plus un simple corpus de connaissances consacrées, objectivées, organisées et hiérarchisées. Le fait en soi n’est pas nouveau, mais il s’impose maintenant dans nos représentations, voire dans les consciences de tous ceux qui, à un titre ou un autre, l’espace d’un blog ou d’une participation à un forum interactif par exemple, s’estiment producteurs de connaissance, explorateurs de nouveaux champs du savoir. En ce sens, la révolution de la société de la connaissance est aujourd’hui moins scientifique que sociologique. C’est moins le savoir qui évolue que notre rapport à ce savoir. Si notre conception de la connaissance bascule, on se doute que c’est un modèle de société, ou ce qu’il en reste, qui se transforme radicalement. L’identité de nos sociétés modernes était déjà minée par le silence de l’histoire, par la fin des narrations, par la question du sens, par celle du progrès, par la perte de cohésion sociale, par la défiance politique, mais le principe de rationalité scientifique, régime de vérité des modernes, tel un ultime rempart, restait une base de relatif consensus et de stabilité. L’élitisme républicain, la sélection des élites par le savoir, même si elle est socialement conditionnée[8], donnait une base solide à notre représentation du savoir et un socle difficilement contestable à la hiérarchie sociale des mérites, à la distribution des places et des revenus. C’est au fond ce dernier pilier de la justification de notre ordre social et de sa légitimité qui est en train de s’effondrer. En effet, l’identité d’un modèle de société est non seulement liée à son système de connaissance, mais celui-ci est au fondement de la distribution des rôles sociaux et de leur répartition dans l’ensemble de la société. La dissolution de notre représentation dominante de la connaissance à travers le paradigme technoscientifique nous entraîne définitivement, pour le meilleur et/ou pour le pire, vers un autre monde en rupture avec la modernité, alors qu’il apparaît encore comme son apothéose. En ce sens, comme le pensait Marx, la connaissance et plus encore le changement de système de connaissance, au-delà des découvertes proprement scientifiques, est par nature le germe des grandes révolutions. L’histoire en propose bien des illustrations.
Régimes de vérité
Les grands modèles de société à travers l’histoire sont bien sûr ancrés dans un système de connaissance particulier, de connaissens pourrait-on dire, manière de décrypter le monde. De ce point de vue, toutes les sociétés se perçoivent naturellement comme des « sociétés de la connaissance » dans leur rapport à leur environnement et à son interprétation. C’est le cas des sociétés primitives dont le mythe forge un système inédit de connaissance du monde, de communication avec les grands ancêtres détenteurs de la vérité des origines. Par la célébration périodique du mythe dans le temps sacré se rejoue non seulement un système d’interprétation du monde mais aussi l’organisation du temps profane, les préceptes et les guides de l’action quotidienne comme la distribution des tâches et des rôles sociaux[9]. De la même manière, le monothéisme et la religion qui en déroule la liturgie sont au cœur du système de connaissance des sociétés du Moyen-âge. La connaissance savante est un patient travail d’herméneutique sur les grands textes sacrés, encadré par les règles formelles et sophistiquées de la scolastique. Spirituelle, elle s’impose au monde matériel avec la scansion des activités quotidiennes au rythme des cloches des églises, sorte de rappel à l’ordre permanent du temps dominant[10]. Ou encore, par l’édification ordinaire de tout un chacun par le prêche et les vitraux des chapelles et cathédrales, dont les discours et les icônes magnifient l’exemple à suivre et tracent le chemin du savoir et de la vérité.
Nouvelle grande rupture dans le système de connaissance avec le siècle des Lumières. Le déplacement apparemment anodin de l’étude de Dieu vers ses créations, de la métaphysique à la physique, va révolutionner le système de connaissance. Tout en ménageant la croyance en un Être suprême, créateur et tout puissant, le centre de la connaissance gravite désormais autour de la compréhension de ses créations dans et par la Nature. Nature de la nature avec l’exposition des lois de l’évolution, l’observation, le recensement, le classement des choses et les nouvelles taxinomies qui participent de l’ordonnancement du nouveau monde. Nature de l’homme aussi qui abdique sa liberté originaire à l’état de nature pour l’association volontaire, le contrat social et ses protections. Nature de la société enfin, de l’exposé des droits naturels aux différents régimes politiques censés les incarner et les préserver. Insensiblement, le livre de Dieu fait place au grand livre de la Nature symbolisé par l’impressionnante encyclopédie de Diderot et d’Alembert où se joue une toute autre scène de la connaissance avec ses descriptions minutieuses, son organisation rationnelle, le relevé des expérimentations, la prédominance des techniques et le triomphe des sciences dégagées de la théologie. L’esprit scientifique définit un nouveau régime de vérité, un nouveau regard sur les choses et sur les hommes, mais aussi une nouvelle « mathématique sociale », pour reprendre l’expression de Condorcet, qui ne va pas tarder à révolutionner la société toute entière en l’ouvrant au grand vent de la modernité dont nous sommes les héritiers. Si le XIXe siècle, ravalant ses désillusions, rêve encore d’un âge positiviste avec Auguste Comte et prolonge la conception scientiste des Lumières, le XXe va en relativiser la portée et, de Thomas Kuhn[11] à Karl Popper[12] en passant par Paul Feyerabend[13], la science perd son caractère d’absolu et de grande promesse pour l’humanité.
La bascule d’aujourd’hui poursuit et amplifie cette déconstruction épistémologique de la connaissance comme vérité scientifique sur un mode plus sociologique. D’un côté, il n’y a plus grand monde pour croire que la science incarne un régime de vérité, au sens d’une vérité du monde physique et métaphysique, comme ont pu le croire les philosophes des Lumières et leurs successeurs directs. La science est toujours relative, c’est même sa condition pour être une science, et elle n’indique aucun chemin, aucune vérité. Ni vérité de l’histoire, ni vérité du quotidien, c’est bien à la catégorie de vérité qu’il faut renoncer dans un monde désenchanté. Toutes les enquêtes le montrent, le doute a envahi les esprits et l’opinion publique, à tort ou à raison, prend aujourd’hui ses distances par rapport au discours scientifique et aux bienfaits supposés du progrès. D’un autre côté, ce même public considère que les grands champs de connaissance qui l’intéressent directement comme l’environnement, l’écologie, les modes de vie et de consommation sont insuffisamment traités et qu’en ces matières, l’usager peut aussi faire preuve d’une grande expertise. La question de ce qui doit faire connaissance et comment elle se construit est aujourd’hui largement ouverte et là se situe en grande partie une nouvelle conception de la connaissance, enjeu essentiel pour les sociétés démocratiques.
Au final, l’expression de « société de la connaissance » est à la fois heureuse et trompeuse. Heureuse, en tant qu’elle met le doigt sur l’émergence d’un nouveau modèle de société tant social avec l’individu expert, qu’économique avec le développement d’un capitalisme cognitif, ou encore politique avec le nouvel impératif d’une démocratie cognitive. Trompeuse tout autant, parce que précisément nous sortons d’une grande période historique, assimilable à la modernité triomphante, qui s’est identifiée au primat de la connaissance comme rationalité et comme science. En ce sens, nous sortons de la société de « la connaissance » pour entrer dans un autre monde où sa représentation mais aussi ses pratiques et modes d’acquisition sont profondément bouleversés et dont il convient maintenant d’évoquer quelques figures parmi les plus courantes.
Figures de la connaissance
On ne sait pas ce que l’on sait
La société de la connaissance s’apprécie généralement à partir de critères formels. Il n’est évidemment pas indifférent que la proportion de bacheliers en France atteigne désormais 64 %[14] d’une génération en 2007 contre seulement 5,3% en 1951, 15,4% en 1967 et 29,4% en 1985, que presque un tiers de cette génération accède à l’enseignement supérieur ou que l’investissement dans la recherche soit plébiscité. On mesure la vive accélération des connaissances académiques et formelles et, au quotidien, avec la vague des produits « bruns » dans la consommation par exemple, les multiples usages des technologies issues des progrès scientifiques. Mais si la connaissance formelle progresse, la connaissance informelle explose. D’une manière générale, la connaissance informelle est un fond inépuisable composée des multiples savoirs et compétences du quotidien[15] dont la connaissance formelle et codifiée n’est que la courte pointe émergée. Autant dire que le « niveau » de la connaissance informelle conditionne le reste. L’essentiel de nos connaissances dérive de nos expériences de vie, de notre environnement, de nos proches, de nos contacts, de la diversité de nos centres d’intérêt, de nos pratiques ludiques, de nos lectures vagabondes, etc. C’est une banalité : nos connaissances proviennent d’un milieu nourricier où domine l’informel, certains auteurs[16] se risquant même à évaluer autour de 80% cette part de nos connaissances. À l’évidence, si nous ne savions que ce que nous avons formellement appris (et retenu !) à l’école ou à l’université par exemple, nous ne saurions pas grand-chose. Pour la plus grande part d’ailleurs, nous ne savons pas ce que nous savons. Nous n’en sommes pas conscients ou nous ne l’assimilons pas au titre de la « connaissance ».
Mais cette banalité n’en est plus une quand la sémiologie du quotidien qui est le nôtre se densifie, se complexifie et devient de plus en plus éducative[17] et « intelligente ». Quand la connaissance informelle devient le terreau de la nouvelle société de la connaissance. En quelques décennies, notre vie quotidienne s’est considérablement enrichie : nous sommes devenus beaucoup plus « mobiles » comme le pointe justement la technologie phare du même nom qui ne nous quitte plus, comme une sorte de miroir de nos identités multiples que nous consultons sans cesse fiévreusement. Mobiles ou encore « nomades », bien que ce mot à la mode fasse trop vite l’impasse sur le désir simultané d’enracinement et de repère identitaire. Mobilité géographique, on ne meurt plus nécessairement là où l’on est né ou après bien des détours[18]; sociale, on change de famille plus seulement pour en fonder une nouvelle, mais souvent pour en recomposer plusieurs tout au long d’une vie plus mouvementée et former ce que l’on appelle désormais des « constellations » familiales variées; professionnelle, nous changeons plusieurs fois d’emploi, et maintenant de métier, de profession au cours d’une vie, entrecoupée de périodes de formation, qui ne cesse de s’allonger, etc. Si comme certains[19] l’ont théorisé, l’histoire de sa formation renvoie à son histoire de vie dans des environnements de plus en plus informatifs et en constante reconfiguration, nous sommes devenus, par goût ou par nécessité, des aventuriers du quotidien, à la formation au long cours, réservée autrefois à une toute petite élite dépeinte dans les romans d’éducation.
Faire connaissance
De même, le lien social dont beaucoup ne voient que la décomposition sans percevoir la recomposition, s’est-il considérablement démultiplié et diversifié. Sans entrer dans le débat entre liens « forts » et liens « faibles »[20], les études de sociabilité, à condition de ne pas exclure les télérelations, montrent qu’ils se sont étendus et que loin de se substituer l’un à l’autre, lien virtuel et réel – hormis une infime minorité – se confortent et se renforcent. Nous sommes dans la relation perpétuelle et dans l’omniprésence du lien social, que celui-ci nous convienne ou non. Quand on sait qu’une très grande partie de nos connaissances provient de ces relations sociales[21], ces réseaux sociaux jouent ainsi comme des réseaux d’échange de savoirs informels[22]. Très tôt, un économiste comme Gary Becker[23] a tenté de mesurer l’impact du capital social sur le capital humain et sur la performance économique pour conclure à l’importance de sa contribution. Pierre Bourdieu, sur un mode critique, a montré la proximité et toute l’influence du capital social sur les autres formes de capital et notamment sur l’acculturation scolaire, la réussite à l’école ou la réussite socioprofessionnelle. Aujourd’hui, les travaux sur l’importance du capital social ont pris une nouvelle dimension, en raison de l’essor des technologies de communication mais tout autant des nouvelles formes de sociabilité, à la fois plus électives et plus horizontales. On se parle de « pair » à « pair », mais loin d’enfermer, cela devient, par extension, une modalité en soi du rapport social où la facilité de rapport, le tutoiement et le langage familier sont plus volontiers d’usage. Cette configuration plus propice aux échanges réciproques, à l’enrichissement mutuel, fertilise un savoir plus sûrement et plus activement que lorsqu’il tombe du haut, sur le mode unilatéral de l’autorité savante. Avec la recomposition et la centralité de la question du lien social, le capital social et sa circulation sont plus que jamais une pièce maîtresse du capital de connaissance. Jamais l’expression « faire connaissance » n’aura sonné aussi juste.
L’intelligence des foules
Cette mutation-recomposition-accélération du lien social a été un facteur décisif de la propulsion des nouvelles technologies de communication (TICE) sur le devant de la scène. Les nouvelles technologies à usage du grand public ne naissent pas et se développent encore moins par hasard. Les laboratoires regorgent d’innovations techniques qui n’ont jamais trouvé leur public, ne correspondant pas à l’air du temps et aux aspirations sociales du moment. Le fabuleux destin de l’Internet en revanche, répond et symbolise cette reformulation horizontale du lien social qu’il favorise et dynamise en retour. En ce sens, l’Internet est une parfaite métaphore technologique de l’évolution du lien social vers le modèle de l’association. Pas de bas, pas de haut, pas de centre, chaque point représentant un individu est par lui-même un nœud de communication d’un vaste réseau interactif. On a dit et redit son importance pour la société de connaissance[24], au point d’y voir sa cause majeure. L’Internet n’est pourtant qu’un outil au service d’un mouvement de connaissance multiforme qui le dépasse, mais il le « concrétise » par ses modes opératoires. C’est un accélérateur de particules. Il rend visible et possible l’accès à tout le savoir du monde, mais surtout, avec le Web 2.0 tout particulièrement, il objective un autre mode de construction de la connaissance et une conception autrement plus large de son acception. Outre les sites interactifs, les blogs et autres forums citoyens, les wikis[25] sont emblématiques de la diversification, de l’enrichissement et des nouveaux modes collaboratifs de construction des connaissances. L’encyclopédie Wikipedia[26], issue de cette technique, totalise à elle seule plus de 10 millions d’articles, traduits en 250 langues… Ses responsables et modérateurs estiment que chaque jour se créent autour de 2000 nouvelles entrées (!), dont les contenus sont en général jugés fiables au bout de quelques temps, le temps de l’autorégulation (la babélisation des expertises), de la régulation automatique (classement et inventaire raisonné), ou de l’intervention de modérateurs externes. Les erreurs, selon les spécialistes, n’étant finalement pas plus nombreuses proportionnellement que dans les encyclopédies classiques du type Britannica, mais en revanche, plus rapidement discutées et rectifiées sur le site de Wikipedia. D’ailleurs, les encyclopédies classiques comme Larousse ou Le Robert sont emportées par le mouvement et mettent en ligne une encyclopédie gratuite et participative. Rien que cette nouvelle réplique électronique du nouveau « grand Livre » de l’univers devrait donner à réfléchir. Plus largement, la technique wiki est de plus en plus utilisée pour répondre à des questions complexes, trouver de nouvelles idées ou tester de nouvelles formules ou de nouveaux produits plus efficacement et à un coût moindre que les recettes du marketing habituel. Des entreprises (comme « InnoCentive » aux États-Unis ou « Crowdspirit » en France) se sont spécialisées dans ce crowdsourcing, consistant à mobiliser le plus possible l’intelligence collective et collaborative pour trouver les solutions optimales, souvent meilleures et plus rapidement que les meilleurs experts. Comme le dit Joël de Rosnay, « Une intelligence des foules est en train de naître…. Des foules connectées en temps réel susceptibles de résoudre des problèmes complexes… Quand une personne clique sur une page, modifie un blog, rédige un commentaire, elle reprogramme le méta ordinateur de l’intérieur ».[27] Se construit ainsi une sorte d’immense cerveau planétaire dont chaque individu est un des neurones, programmant et reprogrammant sans cesse cette intelligence collective et systémique, créant et recréant des liens nouveaux, à la manière de l’hypertexte.
Extension du domaine de l’intelligence
Autre figure de la connaissance en rapide évolution : la pluralité des « intelligences » et l’arrivée des nanotechnologies. Le premier sujet n’est pas nouveau : il y a longtemps que l’on sait – même si l’on en a guère tiré les conséquences – que les modes d’apprentissage et de connaissance sont multiples et non réductibles au seul procès de rationalité, à une intelligence unique et mesurable (QI). Classiquement, les sciences de l’éducation et la psychologie cognitive associent les instances cognitives, affectives et conatives (orientations et motivations des conduites) dans l’analyse des modes d’acquisition des connaissances. Aujourd’hui, notamment sous l’effet de l’essor des sciences cognitives et des neurosciences, le sujet est beaucoup plus présent dans l’actualité et nourrit réflexions et pratiques dans les entreprises adeptes du knowledge management. Ainsi la théorie des intelligences multiples de Howard Gardner[28] propose de distinguer sept grandes manifestations de « l’intelligence » : l’intelligence langagière, logico-mathématique, visuo-spatiale, musicale, kinesthésique, interpersonnelle (compréhension d’autrui) et intrapersonnelle (compréhension de soi). De son côté, Richard Shusterman[29], dans le fil de la pensée pragmatiste de John Dewey, met en avant un « corps pensant », le corps comme lieu d’une pensée à part entière qui va bien au-delà de l’expérience des sens ou du simple refus du dualisme corps/esprit. Le soma pense et nous fait penser. Cette actualité d’une connaissance multiforme est stimulée par les progrès des neurosciences et l’exploration de plus en plus fine des zones cérébrales. Ainsi, les nouvelles techniques d’imagerie cérébrale permettent-elles de visualiser l’activation des connexions neuronales d’individus placés dans des situations de choix et de décision. A l’expérience, les sphères émotionnelles[30] participent activement du travail de l’intelligence, de l’apprentissage et de la décision. La publicité éditoriale de ces théories qui, au moins au plan cognitif et philosophique, sont rien moins que nouvelles ou surprenantes, s’explique bien plutôt par la déconstruction de notre modèle implicite de connaissance au profit d’une extension, d’une globalisation de la connaissance qui fait place à de nouveaux territoires à explorer et où l’ensemble du vivant participe du processus de connaissance.
Dans ce contexte de réflexion et de stimulation des processus de connaissance, les nanotechnologies ouvrent de nouveaux horizons. Pour l’instant, les nanotechnologies colonisent surtout nos prothèses externes, portables, mobiles et microordinateurs. Mais elles vont pouvoir très vite investir le corps humain pour décupler ses performances. Stimulation sensorielle, aide mémoire, activation neuronale sélective, capacité de concentration, dialogue direct entre le cerveau et des bases de données greffées, commande directe du cerveau aux machines et objets, etc. Toutes ces prothèses potentielles ne vont pas tarder à poser au plan de leur développement technologique et de l’éthique les mêmes questions que nous nous posons déjà sociologiquement sur notre conception et sur le sens de la connaissance, comme sur ses nécessaires régulations. En 1994, Pierre Lévy écrivait déjà : « Nous tendons progressivement, peut-être sans le savoir et certainement sans le dire, vers une sélection artificielle de l’humain outillée par la génétique. Le développement des nanotechnologies capables de produire des matériaux intelligents dans la masse, des symbiotes microscopiques artificiels de nos corps et des calculateurs plus puissants que ceux d’aujourd’hui de plusieurs ordres de grandeur pourraient modifier de fond en comble notre rapport à la nécessité naturelle et au travail, et ce de manière beaucoup plus brutale que ne l’ont fait jusqu’à maintenant les diverses phases de l’automatisation. Les progrès des prothèses cognitives à support numérique transforment nos capacités intellectuelles aussi nettement que le feraient des mutations de notre patrimoine génétique. »[31] Là encore, la question des technologies de la connaissance vaut surtout comme illustration du déplacement qui s’opère dans la société de la connaissance. On passe d’une conception de la connaissance objectivée à une connaissance plus centrée sur le sujet et sur ses performances de plus en plus artificiellement coproduites. Ce qui pose à court terme des questions d’éthique, d’équité sociale, de régulation collective et politique, mais aussi, à moyen terme, celles de l’invasion du machinique dans le biologique, de l’artificialisation de la nature humaine et de l’irruption du post-humain, déjà anticipée par la philosophie[32] et par une littérature à succès qui ne relève plus de la science-fiction[33].
Se produire
Ce débordement de la connaissance dans la société éponyme qui se prépare, prend aussi des formes très concrètes et pratiques. Ainsi est-on beaucoup plus attentif aux conditions de production de la connaissance qui lui sont désormais étroitement liées, au point de s’y confondre et de faire partie intégrante du processus même de connaissance. Pour le dire simplement, la connaissance et a fortiori la société de connaissance dans son ensemble nécessitent un milieu favorable et incitatif. La santé par exemple, au sens large du bien-être, est désormais une modalité essentielle de la connaissance. Tous les économistes de la santé en conviennent, la santé n’est plus seulement un effet positif de la croissance et du progrès ou un secteur économique en pleine expansion, mais une condition essentielle qui affecte directement le capital humain et contribue à l’amélioration des performances au cœur de la société de la connaissance[34]. Dans le milieu scolaire, même si les moyens d’investigation et de remédiation manquent pour les enfants les plus défavorisés, la relation entre état de santé et résultats scolaires est beaucoup plus présente. De la simple déficience visuelle ou d’audition mal détectée, au développement moteur et à l’équilibre psychique, on aurait même tendance aujourd’hui – avec les caractériels ou les hyperactifs par exemple – à biologiser et à médicaliser à l’excès les facteurs d’intégration, d’apprentissage et de réussite à l’école. La corrélation entre santé et développement des compétences au travail n’est plus à démontrer, à telle enseigne que certaines entreprises n’hésitent plus à prendre directement en charge la « santé » de leurs salariés. Consultations médicales gratuites sur le lieu de travail, offre de thérapies en tout genre, conseil pour le bien-être physique et mental, salle de sports, facilités pour les activités physiques et de relaxation, la santé est de plus en plus comprise comme un facteur essentiel de la productivité globale. Autrement dit, la santé au travail n’est plus conçue seulement en termes de protection, de prévention, d’adaptation ou d’ergonomie mais comme un facteur intrinsèque de la performance. Ainsi, l’un des récents débats organisé par la puissante Association Nationale des Directeurs et Cadres de la fonction Personnel (ANDCP) portait en titre : « Quelle santé au travail pour quelle performance économique ? » C’est encore plus vrai si l’on met l’accent sur la dimension du bien-être. A l’évidence, la société de connaissance ne peut s’accommoder des conditions de travail de la société industrielle. Pour toute une série de raisons. On ne produit pas l’intelligence comme n’importe quel bien ou service. Le travail sur la connaissance suppose de la reconnaissance, de la valorisation individuelle, de la coopération, de la liberté, de l’autonomie, de l’initiative, de la créativité, de l’accompagnement, de la relation informelle et non hiérarchisée, de la communication interactive, du travail en réseau, de la formation permanente, du temps disponible, etc. On n’en finirait pas d’énumérer tous les préceptes et bonnes pratiques du knowledge management qui l’oppose ou le distingue en principe des formes habituelles de la gestion du personnel. Un homme, bien avant l’heure, a prouvé sa redoutable efficacité en se concentrant sérieusement sur l’optimisation des conditions de production de la connaissance, sans se contenter de bonnes paroles. Il s’agit de François Dalle[35] qui a transformé une petite entreprise locale, « Monsavon », en une des plus performantes et puissantes multinationales au monde : « L’Oréal ». Quand on lui demandait les clés de son succès, il répondait invariablement en deux mots : les femmes et les chercheurs. La passion des femmes qui conduisait le PDG à réaliser son marketing direct par d’interminables discussions dans les salons de coiffure pour mieux saisir les besoins et envies de ses clientes. Mais aussi et surtout les chercheurs dont il disait avec modestie que ces travailleurs de la connaissance avaient fait la fortune de la grande maison. En conséquence, il s’était donné comme mission prioritaire de tout faire pour que ceux-ci, délivrés de tout souci, soient dans les conditions matérielles et psychologiques les plus adéquates possible pour le travail de réflexion et d’innovation. Bien payés, reconnus, écoutés, traités en égaux par un patron qui avait compris avant tout le monde ce que signifiait le travail sur la connaissance qui est aujourd’hui autrement plus répandu[36]. Il n’avait pas recruté à prix d’or les « meilleurs », beaucoup étaient au départ de simples ingénieurs chimistes maison, mais il avait su leur donner les meilleures chances de le devenir.
Au total, la production de connaissance ne se « commande » pas, elle est loin de s’arrêter aux seules facultés intellectuelles, elle suppose idéalement de créer un milieu favorable qui donne à l’individu l’opportunité de s’autoproduire dans toutes ses virtualités. Dans la société de la connaissance, se produire est la condition du produire. Cela n’a plus rien à voir avec le travail classique. On est loin d’avoir pris conscience de cette mutation des conditions de production de la connaissance, à l’heure où la société de la connaissance est souvent encore perçue à travers la réussite intellectuelle d’une petite élite consacrée par les institutions éducatives.
Libérer la connaissance
Le travail sur l’individualité, sur sa production et son originalité conduit à d’autres déplacements de notre conception de la connaissance. Elle se présente aujourd’hui moins comme un résultat, comme une somme ou une accumulation et plus comme un travail de création et d’innovation. La connaissance est un flux permanent évalué à l’aune du potentiel de créativité, d’originalité, de nouveauté. C’est bien sûr aussi l’effet d’un marché en quête d’innovation permanente et à obsolescence accélérée. Mais plus encore, technologies aidant, une conséquence de la facilité d’accès au « stock » de connaissance sur n’importe quel sujet. Du même coup, le travail de connaissance évolue. Il s’agit moins d’assimiler graduellement et logiquement l’ensemble d’un corpus pour le prolonger mais plutôt de jouer des associations inattendues, des rapprochements inédits, des reformulations conceptuelles, des traversées disciplinaires, etc. C’est moins la connaissance proprement dite qui compte que la capacité à en générer de nouvelles autour de qualités qui font plus de place à l’imagination, l’intuition, la transgression. Sans céder au déterminisme technologique des medias d’un Mc Luhan[37] pour qui le medium conditionne l’information, l’Internet a insensiblement modifié notre rapport à la connaissance et à l’apprentissage. Les plus jeunes savent tirer le meilleur parti de cette « navigation », « exploration » de la connaissance sans frontières, passant d’un sujet à l’autre, zappant d’un site à un autre au fil des appels de l’hypertexte, capables de faire plusieurs recherches à la fois, captant simultanément l’information par portable, Internet ou messagerie. Ce que certains ont appelé le syndrome de la « tête vide » et d’autres une « culture mosaïque »[38], est en réalité un autre mode de fonctionnement mental, un autre type de rapport à la connaissance. On conçoit aisément le décalage avec l’apprentissage académique et les réactions normatives du monde enseignant. Mais, qu’on le veuille ou non, ce modèle progresse tout simplement parce qu’il est le plus efficace dans le monde d’aujourd’hui. On peut regretter la méconnaissance de la conjugaison à l’imparfait du subjonctif comme l’enseignant d’ »Entre les murs »[39], mais ses élèves du vingtième arrondissement de Paris, plutôt bien éveillés, ne comprennent vraiment pas son utilité ni avec qui ils vont pouvoir s’y exercer. De la même manière, la progression de la pensée systémique et du paradigme de la biologie, chère à Edgar Morin, au regard de la stricte pensée analytique, ne représente pas nécessairement une supériorité en soi, mais une configuration plus adaptée à la réalité socioculturelle du moment. Cette connaissance comme création n’est bien sûr pas sans rappeler le travail de l’artiste[40]. L’artiste « se produit ». Doublement. Il se produit sur scène le temps court du spectacle. Mais ce spectacle est lui-même une production qui résulte de l’intense travail imprescriptible que l’artiste réalise sur lui-même par sa recherche artistique. Le travail sur la connaissance lui ressemble, la performance évaluée est bien de l’ordre de la créativité, de la capacité à trouver des solutions nouvelles et innovantes. Mais ce « travail » est le résultat d’un investissement de la personne dans ses différentes dimensions cognitives, dans son développement personnel, dans sa capacité à travailler sur ses propres qualités dans un environnement porteur.
Culture du quotidien
La connaissance a envahi la société qui en retour lui imprime d’autres significations, d’autres modèles d’apprentissage, d’expression et de diffusion. Ses principaux caractères sont l’individualisation : le savoir passe de « l’avoir » à « l’être » comme le résume Marcelle Stroobants[41], du corpus à celui qui le génère sur le mode le plus souvent informel de compétences irréductibles à la codification. Chaque individu possède son propre profil cognitif et « s’il vous prend la faiblesse de penser que quelqu’un est ignorant, ajoute Pierre Lévy, cherchez dans quel contexte ce qu’il sait devient de l’or »[42]; la diversification, avec une connaissance plus « ascendante » que « descendante » où les nouveaux savoirs sur la vie quotidienne, les expertises de chacun, les jeux, les passions informatiques[43], l’environnement, acquièrent leur légitimité et dopent la créativité ; la communication permanente, l’interaction sociale et l’enrichissement du capital social qui, certes de manière inégale, touche l’ensemble des catégories sociales et produit la démultiplication des « connaissances » dans tous les sens du mot ; la pluralité des modes d’apprentissage avec la multiplication des expériences de vie, de loisirs et de centres d’intérêt.
Tels sont quelques uns des caractères plus particuliers à la société de la connaissance qui nous vient et que l’on retrouve dans la plupart des pratiques sociales. Elle forme déjà et va former plus encore la trame de notre vie quotidienne. Un nouveau bain culturel irrigue la société, il n’est plus seulement aujourd’hui le produit de la démocratisation du savoir mais plutôt celui de sa recomposition sous des formes inédites, variées dont chacun à sa manière se trouve à la fois dépositaire et actionnaire. Dès 1969, Robert Hutchins affirmait : « Dans les sociétés du savoir, le rôle du public ne cessera de s’accentuer car celui-ci est un élément à part entière du processus d’innovation, qui met l’accent sur la dimension sociale de la créativité et suppose un véritable partage du savoir entre des contributeurs venant d’horizons différents. »[44] En dépit de toutes les résistances et objections de ceux qui voudraient enfermer la connaissance dans leur propre culture afin de mieux la monopoliser, un savoir démocratique tend à s’élaborer, une nouvelle « culture de la connaissance » voit le jour. Elle percute notre société à tous les niveaux. C’est pourquoi, cette société de la connaissance en émergence, tel un fluide enveloppant[45], me semble une assez bonne grille de lecture pour comprendre le sens des grandes transformations et contradictions en cours dans la plupart des sphères de notre société. Tout particulièrement du côté des grandes institutions, relativement statiques et lentes dans leurs évolutions profondes, comme le travail, l’éducation ou encore notre représentation de la démocratie. C’est à la lumière de cette nouvelle connaissens que l’on peut saisir leur dynamique de changement et en rechercher le sens commun.
[1] Knowledge Society est l’expression consacrée et partagée. Peter Drucker est un des premiers à l’utiliser in The Age of Discontinuity. Guidelines to our Changing Society, N-York, Harper and Row, 1969.
[2] Learning Society. Voir le livre fondateur de Robert Hutchins, The Learning Society, London, Harmondsworth, Penguin, 1968 et Philippe Carré, L’Apprenance, Paris, Dunod, 2005.
[3] Les dégâts du progrès, CFDT, éditions du Seuil, 1977.
[4] Conseil européen de Lisbonne, mars 2000.
[5] Accomplir la stratégie de Lisbonne. Contribution du Conseil économique et social à la préparation du programme national de réforme 2008-20010, Conseil économique, social et environnemental, 8 juillet 2008.
[6] Vers les sociétés du savoir, Rapport mondial de l’UNESCO, 2005.
[7] Alexandre Léné et Danilo Martucelli, « La société de la connaissance et l’école : jalons pour une discussion. » Dossier éducation et Sociétés, n°15, 2005.
[8] Dans les théories critiques de la reproduction, c’est moins l’élitisme qui est en question que les conditions égales de son accès. Voire Éric Maurin, Le Ghetto français. Enquête sur le séparatisme social, La République des idées, éditions du Seuil, 2004.
[9] Edward Evans Pritchard, Les Nuers. Description des modes de vie et des institutions d’un peuple nilote, Paris, Gallimard, 1968.
[10] Ce que je décris plus longuement dans Temps et ordre social, Paris, Presses Universitaires de France, …..
[11] Thomas Kuhn, La Structure des révolutions scientifiques, Paris, Flammarion, 1972.
[12] Karl Popper, La Connaissance objective, Paris, Champs Flammarion, 1999.
[13] Paul Feyerabend, Contre la méthode, Paris, Points Seuil, 1988.
[14] 63, 6% très exactement, toutes séries confondues pour un taux de réussite de 83,3%.
[15] Michel de Certeau, Luce Giard, Pierre Mayol, L’invention du quotidien, tome 1 : Arts de faire, Paris, Folio Gallimard, 1990.
[16] David Kolb, Experiential Learning, Englewood Cliffs NJ, Prentice Hall, 1984 et Allen Tough, Reflections on the study of adult learning, Ontario Institute for Study in Education, Ontario, Toronto, 1971.
[17] Voire par exemple, Joffre Dumazedier, Société éducative et pouvoir culturel, Paris, Seuil, 1976 et Jacky Beillerot, La société pédagogique, Paris, Presses Universitaires de France, 1982.
[18] Dans certains villages reculés de la Picardie maritime, à quelques kilomètres de la baie de Somme, on rencontre encore d’anciens cultivateurs qui ne sont pratiquement jamais sortis de chez eux et avouent n’avoir jamais vu la mer…
[19] Gaston Pineau, Marie-Michelle. Produire sa vie : Autoformation et Autobiographie, Paris, Edilig, 1983.
[20] Mark Granoveter, The Strenght of Weak Ties, American Journal of Sociology, 78, 1973.
[21] Jérôme Eneau, La Part de l’autre dans la formation de soi, Paris, L’Harmattan, 2007.
[22] Réalité qui inspirera la création et la dissémination des nombreux « Réseaux d’échanges réciproques de savoir » de Claire et Marc Héber Suffrin. Voire notamment, Le Cercle des savoirs reconnus, Paris, Desclée de Brouwer, 1993.
[23] Gary Becker, The Economic Approach to Human Behavior, Chicago, University of Chicago Press, 1976.
[24] Dominique Foray, L’économie de la connaissance, Paris, éditions La Découverte, 2000.
[25] Wiki vient de l’Hawaïen wiki wiki qui signifie à la fois rapide et informel. Il s’agit d’un site Web dynamique dont tout individu peut modifier, enrichir voire créer des pages à volonté.
[26] Wikipedia, lancé en 2001, fait aujourd’hui partie des dix sites les plus consultés au monde…
[27] Joël de Rosnay, « Civilisation du numérique et intelligence connective », World Knowledge Dialog, Crans Montana, 11 septembre 2008. Voire également du même auteur, La Révolte du pronétariat. Des mass media aux media de masse, Paris, Fayard, 2006;
[28] Howard Gardner, Les intelligences multiples, Paris, éditions Retz, 2004. Parmi ses applications, Manager les intelligences multiples : La théorie de Gardner appliquée à l’entreprise, Bruno Hourst et Denis Plan, Paris, éditions Dunod, 2008.
[29] Richard Shusterman, Conscience du corps. Pour une soma-esthétique, Paris, éditions de l’éclat, 2007.
[30] Voir aussi, Daniel Goleman, Emotional Intellligence, N-York, Bantam Books, 1995.
[31] Pierre Lévy, L’intelligence collective, Paris, éditions La Découverte, 1994.
[32] Peter Sloterdijk, Règles pour le parc humain, Paris, Mille et une nuits, 2000.
[33] Michel Houellebecq, déjà présent dans Les Particules élémentaires, le thème est repris et approfondi dans La Possibilité d’une île, Paris, Fayard, 2005.
[34] Béatrice Majnoni d’Intignano, économie de la santé, Paris, Presses Universitaires de France, 2001.
[35] François Dalle, L’aventure L’Oréal, Paris, éditions Odile Jacob, 2001.
[36] Jean-Paul Bouchez, Les nouveaux travailleurs du savoir, Paris, éditions d’Organisation, 2004.
[37] Marshall Mc Luhan, Understanding Media: The Extensions of Man, McGraw-Hill, 1964.
[38] Abraham Moles, Sociodynamique de la culture, Paris, Mouton, 1973.
[39] « Entre les murs », film de Laurent Cantet qui a obtenu la palme d’or au festival de Cannes 2008.
[40] Pierre-Yves Menger, Portrait de l’artiste en travailleur, Paris, La République des idées, éditions du Seuil, 2002.
[41] Marcelle Stroobants, Savoir-faire et compétences au travail, Bruxelles, éditions de l’Université de Bruxelles, 1993.
[42] Pierre Lévy, L’intelligence collective, op.cité.
[43] Les fameux « garages pépinières » de la Silicon Valley d’où sont sortis les Microsoft, Google et autres Yahoo !
[44] Robert Hutchins, The Learning Society, op.cité.
[45] Voir Zygmunt Bauman, La Vie liquide, Chambon, éditions du Rouergue, 2006.
Roger Sue est sociologue, professeur à l’université Paris V.